La technologie de l’Eawag à la biennale d’architecture de Venise

Le samedi 20 mai, la 18e biennale d’architecture a ouvert ses portes à Venise. Au pavillon allemand, centré sur la construction sur l’existant et l’économie circulaire, le «Nutrient Harvester» développé à l’Eawag est aussi en service. Il transforme sur place l’urine de deux toilettes sèches en engrais.

La biennale d’architecture de Venise, l’un des salons d’architecture les plus importants au monde, a cette année pour thème «Laboratory of the Future». Outre les expositions principales organisées par l’architecte ghanéenne-écossaise Lesley Lokko, 60 pays sont représentés par des contributions nationales, dont la Suisse et l’Allemagne. Le pavillon allemand est organisé par le magazine d’architecture ARCH+ et les cabinets d’architectes Summacumfemmer et Büro Juliane Greb. Avec pour thème «Open for Maintenance / Wegen Umbau geöffnet», il se focalise sur l’entretien, la réparation et la maintenance du bâti architectural. Les organisatrices et organisateurs ont ainsi réutilisé le matériel de la biennale de l’art de l’année dernière pour équiper les cinq pièces que compte le pavillon.

Des toilettes sans chasse d’eau

L’économie circulaire est aussi le thème central dans les «sanitaires», l’une des cinq pièces. Ils sont équipés de toilettes sèches et d’un urinoir, tous deux nouvellement développés. Les toilettes du fabricant allemand Finizio ne consomment pas d’eau et séparent l’urine des matières fécales. L’urinoir a été développé par deux diplômées en design industriel de la Haute école d’art et de design de Bâle. Elles ont été soutenues entre autres par Michel Riechmann de l’Institut de recherche sur l’eau Eawag. L’urinoir fonctionne également sans eau et peut en outre être utilisé par tous les sexes, d’où son nom «Urin*all». Les toilettes sèches comme l’urinoir ne sont pas uniquement des pièces d’exposition, car ils peuvent être utilisés par les visiteurs et visiteuses ainsi que par le personnel du pavillon.

L’urine devient de l’engrais

Tandis que les matières fécales sont recueillies pour être compostées chez un agriculteur de la région, l’urine – qui constitue le plus gros volume – est traitée sur place. Dans le Nutrient Harvester, développé par Michel Riechmann en collaboration avec Kai Udert et d’autres chercheuses et chercheurs du département Technologie des procédés de l’Eawag, l’urine est directement transformée en engrais concentré dans le pavillon allemand. Pour cela, elle est tout d’abord stabilisée, afin que l’azote qu’elle contient ne s’échappe pas et qu’aucune mauvaise odeur ne se développe. Par ailleurs, les agents pathogènes sont éliminés à cette étape. L’urine est ensuite séchée. 30 litres d’urine donnent un kilogramme de substance sèche, un engrais pour les plantes riche en nutriments comme l’azote, le phosphore et le potassium. Cet engrais est ensuite utilisé par un agriculteur et une coopérative de jardins de la région de Venise. «Nous fermons ainsi le cycle local des nutriments et réduisons simultanément leur apport dans les cours d’eau», explique Michel Riechmann.

Utilisation dans les régions sans eau ni réseau d’eaux usées

Ces dernières années, les chercheuses et chercheurs ont testé le Nutrient Harvester dans le refuge «Leglerhütte» du Club alpin suisse et dans un foyer sans infrastructure pour les eaux usées en périphérie de la ville de Durban, en Afrique du Sud. «Cette technologie est appropriée partout où il n’y a pas de raccordement au réseau d’eau et d’eaux usées, que ce soit dans les régions pauvres en infrastructures ou pour des utilisation temporaires et mobiles», précise Michel Riechmann. Venise, et en particulier la biennale, est selon lui un champ d’application très intéressant. «Le traitement des eaux usées est un défi pour une ville construite sur l’eau où les eaux usées ne doivent pas être déversées dans les canaux ouverts», explique Michel Riechmann. Et à la biennale, les toilettes ne sont pas nombreuses. Les pavillons ne disposent pas de leurs propres toilettes et il est difficile d’équiper ultérieurement une infrastructure pour des questions de droit de construction. «Un système modulaire prêt à l’emploi comme le Nutrient Harvester peut aider à combler ce manque», ajoute Michel Riechmann, convaincu. Les chercheuses et chercheurs souhaitent à présent pouvoir commercialiser le Nutrient Harvester et sont en train de créer à cet effet un spin-off à l’Eawag.

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